26 July 2024
Environnement

Climat : le GIEC met le monde face à ses responsabilités

  • 21 mars 2023
  • 9 min read
Climat : le GIEC met  le monde face à ses responsabilités

Sous l’égide de l’ONU, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a présenté lundi, le rapport de synthèse de son dernier cycle de travaux, initié en 2015. Le document résume les six derniers rapports publiés par l’institution à travers une version actualisée de ce que les scientifiques et gouvernants du monde entier s’accordent à dire sur le réchauffement climatique.

1970-2020 une période de réchauffement sans précédent

Le texte explique d’abord que la température moyenne qui a été relevée à la surface de la Terre entre 2011 et 2020 a été 1,1 °C plus élevée que celle relevée durant la période 1850-1900, qui marque le début de la période industrielle.
Il indique ensuite que la période 1970-2020 a vu la température relevée sur Terre augmenter dans une proportion jamais vue depuis au moins 2000 ans, et que 42 % des gaz à effet de serre émis depuis 1850 l’ont été depuis 1990. En découle un constat : le réchauffement climatique est déjà là, et il s’accélère.

L’homme, plus grand bourreau du climat et plus grande victime du réchauffement

Le GIEC insiste : l’homme est bel et bien responsable du réchauffement climatique en cours. Sur le réchauffement de 1,1 °C observé depuis la fin du XIXe siècle, 1,07 °C est dû aux gaz à effet de serre liés à l’activité humaine. Le rapport décrit également les conséquences assez visibles de ce réchauffement climatique lié aux activités humaines. Dans toutes les régions du monde, il affecte déjà de nombreux extrêmes météorologiques et climatiques.

Parmi ces événements extrêmes qui, du fait du réchauffement climatique, se sont multipliés ces dernières décennies, on retrouve notamment les canicules et vagues de chaleur, les sécheresses et les pluies extrêmes. Le niveau des mers a en moyenne augmenté de 20 cm entre 1901 et 2019, le rythme de cette élévation s’accentue et le niveau des mers continuera à augmenter durant des siècles. Le Giec note par ailleurs que les conséquences actuelles du réchauffement sont plus graves que ce qui avait été anticipé.

3,3 à 3,6 milliards de personnes (soit plus de 40 % de la population mondiale) vivent dans des contextes qui les rendent très vulnérables au changement climatique. « Les pertes et dommages liés au réchauffement climatique font partie de notre futur », avertit Hoesung Lee, le président du Giec.

L’injustice des impacts

Le rapport formalise par ailleurs le fait que le réchauffement à un impact majeur dans les pays qui n’y ont que peu contribué. « Les communautés vulnérables, qui ont historiquement moins contribué au changement climatique actuel, sont disproportionnellement affectées », regrette le Giec, en précisant le cas des pays en développement et des petites îles des Caraïbes ou du Pacifique Sud.

Pour étayer son propos, le Giec rapporte que les pays les moins développés n’émettent que 1,7 tonne de gaz à effet de serre par habitant et par an, quand la moyenne mondiale est à 6,9. Or, comme l’a rappelé Hoesung Lee, les habitants de ces pays, qui sont souvent des zones vulnérables, ont 15 fois plus de chances de mourir du fait d’un événement climatique extrême que ceux des zones plus préservées.

Les espoirs pourraient s’essouffler….il y a de quoi craindre pour demain

Le Giec indique également qu’il est probable que, mis bout à bout, les objectifs nationaux de réductions d’émissions de gaz à effet de serre ne suffisent pas à contenir le réchauffement sous la barre des 1,5 °C. Et il précise que ces objectifs rendent même difficile un maintien du réchauffement sous la barre des 2 °C. Par ailleurs, l’institution note qu’il existe des écarts entre les émissions qui sont liées aux politiques actuellement mises en place et les objectifs d’émissions annoncés. Ces objectifs, déjà insuffisants, ne sont donc pas tenus. Même s’il assortit cette prédiction d’un niveau de confiance moyen, le Giec note que, si rien ne change, le monde se dirige vers un réchauffement de 3,2 °C en 2100.

2070, le tournant de la dernière chance

Il précise enfin que, pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, l’humanité doit atteindre la neutralité carbone (autant de gaz à effet de serre émis que captés) en 2050. Et elle doit le faire d’ici 2070 pour rester sous la barre des 2 °C. Néanmoins, le rapport détaille qu’en matière de lutte contre le réchauffement climatique, ces seuils ne sont pas les seules variables à prendre en compte ou à viser. Pourquoi ? Parce que, pour limiter les risques futurs, chaque dixième de degré compte. « Les risques, impacts négatifs, pertes et dommages liés au réchauffement climatique s’intensifient avec chaque fraction de réchauffement supplémentaire », explique ainsi le Giec. Entre ces fameux seuils de 1,5 et 2 °C, il y a toute une palette de futurs possibles. Et ceux-ci sont tous plus ou moins (in)désirables.

Quand le réchauffement s’accélère et que le monde traîne les pas

Le rapport insiste également sur le fait que le monde n’est pas encore prêt à affronter les conséquences du réchauffement climatique. Certes, note le texte, la conception et l’implantation de plan d’adaptation progressent et ce, dans tous les secteurs et dans toutes les régions. Mais le Giec pointe des écarts importants en la matière. Autrement dit, si certains pays ont bien avancé sur ces thématiques, d’autres n’ont pas pu le faire, des limites à l’adaptation ayant été atteintes dans certains écosystèmes ou secteurs géographiques.

Passer de la procrastination climatique à l’action climatique : le carrefour du choix

L’institution regrette également une « maladaptation » (changement qui accroît la vulnérabilité d’une population au lieu de la diminuer) de plus en plus prégnante. Ces lacunes dans l’adaptation sont d’autant plus dommageables que, comme le rappelle le Giec, les mesures qui peuvent être mises en place actuellement seront moins efficaces quand le climat se sera davantage réchauffé. « Nous devons passer de la procrastination climatique à l’action climatique », a résumé la représentante du programme de l’Onu pour l’environnement, lors de la conférence de presse de présentation du rapport.

2023, la limite du gouffre …..

Sur le volet de l’atténuation du réchauffement climatique, le rapport indique qu’il ne reste plus, en ce mois de mars 2023, que très peu de temps à l’humanité pour agir de manière significative. La fenêtre d’opportunités qui doit lui permettre de sécuriser un futur vivable et soutenable pour tous se referme rapidement, regrette effectivement l’institution. À titre d’exemple, le Giec explique que, pour maintenir le réchauffement sous la barre des 1,5 °C, le pic mondial d’émissions de gaz à effet de serre doit être atteint… en 2025.

Courir pour demain au lieu de marcher aujourd’hui

Le rapport rappelle également l’ampleur de la tâche à laquelle doivent désormais s’atteler les citoyens et pays du monde entier. En se rapportant aux actions actuellement menées, Hoesung Lee, le président du Giec a indiqué que « nous marchons, alors que nous devrions courir ». Pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, la baisse des émissions mondiales de gaz à effet qui doit être observée entre 2019 et 2030 est en effet de l’ordre de 43 %.

D’ici à 2050, la baisse doit être de 84 %.Pour limiter le réchauffement à 2 °C, la baisse est mécaniquement moins marquée, tout en restant importante (-21 % d’ici à 2030, -64 % d’ici à 2050). « Le changement systémique nécessaire pour parvenir à des réductions rapides et profondes des émissions […] est sans précédent en termes d’échelle », explique le Giec. « Mais pas nécessairement en termes de rapidité », estime-t-il néanmoins.

Heureusement, l’humanité n’est pas tout à fait désarmée. Des solutions d’atténuation et d’adaptation réalisables, efficaces et peu coûteuses existent déjà, rappelle le rapport. À titre d’exemple, les dispositifs visant à utiliser « l’énergie solaire et l’énergie du vent sont techniquement viables , moins chers que par le passé (-85 % en dix ans pour le solaire, -55 % pour l’éolien) et « généralement acceptés par la population ». Le Giec note néanmoins qu’une fois encore, toutes les régions du monde et tous les secteurs ne sont pas logés à la même enseigne en la matière.

Multiplier les flux financiers

Le rapport insiste également sur le rôle que doit jouer la finance mondiale. Pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, les flux financiers fléchés vers le climat doivent effectivement être multipliés par au moins trois. « Mais il existe assez de flux financiers pour réduire rapidement les émissions », a rassuré Hoesung Lee, le président du Giec. Plus généralement, ce dernier a expliqué que, les solutions étant à disposition, il ne manquait maintenant qu’une « volonté politique ». « Beaucoup d’actions visant à atténuer le réchauffement climatique auront un impact positif sur la santé humaine », explique-t-il, évoquant « une moindre pollution de l’air », des mobilités plus actives et des régimes alimentaires plus sains. Les stratégies d’adaptation au réchauffement climatique peuvent « améliorer la productivité agricole, la santé, le bien-être » et contribuer à préserver la biodiversité.

Cécile Goudou

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